Une gencive qui saigne au brossage, un goût métallique ou une mauvaise haleine persistante peuvent sembler anodins. Pourtant, ces signes peuvent annoncer une maladie parodontale, c’est-à-dire une atteinte des tissus qui soutiennent la dent.
La parodontite en est la forme avancée : une inflammation chronique provoquée par des bactéries parodontales qui s’attaquent progressivement à l’os et aux fibres qui maintiennent les dents.
Le bon réflexe ? Un dépistage précoce et une prise en charge adaptée permettent de stabiliser la maladie et d’éviter la perte dentaire.
🩺 Qu’est-ce que la parodontite ?
La parodontite est une maladie inflammatoire chronique qui touche les tissus de soutien de la dent : la gencive, le ligament parodontal et l’os alvéolaire.
Elle fait partie des maladies parodontales, un terme qui englobe à la fois :
- la gingivite, inflammation superficielle réversible de la gencive ;
- et la parodontite, forme plus profonde et irréversible si elle n’est pas traitée.
Mécanisme simplifié
La parodontite débute souvent par une accumulation de plaque dentaire (biofilm) à la jonction entre la dent et la gencive. Ces bactéries parodontales déclenchent une réponse immunitaire excessive :
l’organisme tente de se défendre, mais cette inflammation prolongée finit par détruire les tissus de soutien (fibres d’attache et os alvéolaire).
C’est cette perte d’attache qui caractérise la maladie et explique la mobilité dentaire progressive.
Une maladie mondiale aux conséquences sous-estimées
Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), la parodontite sévère touche près d’un milliard de personnes dans le monde, et les maladies bucco-dentaires dans leur ensemble concernent 3,5 milliards d’individus — soit près de la moitié de la population mondiale.
Elles représentent aujourd’hui l’un des principaux enjeux de santé publique, avec un impact croissant sur la qualité de vie, la nutrition et la santé générale.
🩸 Symptômes & signes cliniques de la parodontite
Les signes de la parodontite sont souvent discrets au début, puis s’aggravent progressivement.
Contrairement à une simple gingivite, la parodontite touche les tissus profonds : fibres d’attache, os alvéolaire et ligament parodontal.
Signes cliniques les plus fréquents
- Saignement au brossage ou au sondage par le dentiste (signe d’inflammation persistante).
- Poches parodontales : espace anormal entre la gencive et la dent, où s’accumulent les bactéries.
- Perte d’attache : recul de la gencive et destruction des fibres de soutien.
- Mobilité dentaire ou sensation de dents qui bougent.
- Récession gingivale : allongement apparent des dents.
- Abcès parodontal : tuméfaction douloureuse localisée.
- Haleine persistante (halitose) ou mauvais goût en bouche.
Mesures et diagnostic clinique
Lors de l’examen parodontal, le dentiste mesure :
- la profondeur des poches à l’aide d’une sonde millimétrée,
- la présence de saignement (indicateur d’inflammation active),
- la perte d’attache clinique (distance entre la gencive et l’os),
- et analyse les radiographies pour évaluer la résorption de l’os alvéolaire.
Ces indicateurs permettent d’établir un diagnostic précis et de déterminer le stade et le grade de la maladie.
🧬 Causes & facteurs de risque de la parodontite
La parodontite résulte d’une interaction complexe entre les bactéries du biofilm dentaire et la réponse immunitaire de l’hôte.
Autrement dit, ce ne sont pas uniquement les microbes qui causent la maladie, mais aussi la manière dont le système immunitaire réagit à leur présence.
Mécanisme causal
- Biofilm bactérien : la plaque dentaire forme un écosystème riche en bactéries parodontales (comme Porphyromonas gingivalis ou Tannerella forsythia).
- Inflammation chronique : le système immunitaire s’active pour éliminer ces bactéries.
- Déséquilibre immunitaire : si la réponse est excessive ou prolongée, elle entraîne la destruction des tissus de soutien (os, fibres, gencive).
- Résultat : perte d’attache et risque de parodontite avancée.
Parodontite et santé générale
Les recherches récentes suggèrent un lien entre maladies parodontales et pathologies systémiques comme :
- les maladies cardiovasculaires (via l’inflammation systémique),
- le diabète, avec une influence mutuelle bien démontrée,
- ou certaines affections métaboliques et respiratoires.
Ces associations ne signifient pas que la parodontite “cause” ces maladies, mais qu’elles partagent des mécanismes inflammatoires communs.
🧾 Stades & grades de la parodontite (classification 2018 AAP/EFP)
Depuis 2018, la classification internationale AAP/EFP a modernisé la manière d’évaluer la parodontite.
Cette approche distingue deux notions complémentaires :
- les stades, qui décrivent la sévérité et la complexité de la maladie ;
- les grades, qui estiment la vitesse de progression et les facteurs de risque associés.
Staging vs Grading : comprendre en un coup d’œil
Utilité clinique
Cette classification permet au praticien :
- d’adapter le plan de traitement selon la sévérité et la complexité du cas,
- d’identifier les patients à haut risque (fumeurs, diabétiques),
- et d’améliorer la prédiction de progression pour le suivi à long terme.
📉 Comment évolue la parodontite sans prise en charge ?
Sans traitement, la parodontite suit une évolution lente mais progressive et irréversible.
Elle commence par une gingivite (inflammation réversible de la gencive), puis s’étend vers les tissus profonds jusqu’à détruire l’attache parodontale et l’os alvéolaire.
Conséquences fonctionnelles et esthétiques
- Fonctionnelles : mastication difficile, sensibilité, risque de déplacement dentaire ou de perte définitive.
- Esthétiques : allongement des dents, rétractions gingivales, déséquilibre du sourire.
- Épisodes aigus : surinfections possibles (abcès parodontal).
Plus le diagnostic est tardif, plus la perte tissulaire est importante.Un suivi précoce permet souvent de stabiliser la maladie et de préserver les dents naturelles.
🧠 Les traitements de la parodontite : les 4 étapes clés selon l’EFP
Le traitement de la parodontite repose sur une approche structurée et progressive, validée par les recommandations EFP S3 (European Federation of Periodontology).
L’objectif : contrôler l’infection, réduire l’inflammation, restaurer la fonction, puis maintenir les résultats à long terme.
Étape 1 — Contrôle des facteurs & éducation
Cette première phase est fondamentale : elle conditionne l’efficacité de tous les traitements suivants.
Le dentiste accompagne le patient pour modifier les comportements à risque et améliorer l’hygiène bucco-dentaire quotidienne.
Objectifs principaux :
- Enseigner les gestes bucco-dentaires efficaces : brossage biquotidien, brossettes interdentaires, fil dentaire.
- Arrêt du tabac : essentiel pour améliorer la cicatrisation et la réponse immunitaire locale.
- Contrôle glycémique chez les patients diabétiques.
- Adapter la nutrition : privilégier une alimentation anti-inflammatoire (riche en oméga-3, antioxydants, fibres).
- Suivi régulier de la motivation et de la technique d’hygiène à chaque rendez-vous.
Étape 2 — Traitement non chirurgical
C’est la base du traitement parodontal. Elle vise à éliminer le biofilm et le tartre responsables de l’inflammation.
Procédures réalisées :
- Détartrage et surfaçage radiculaire (SRP) quadrant par quadrant, sous anesthésie locale si besoin.
- Lissage des racines pour favoriser une recolonisation bactérienne saine.
- Prescription ponctuelle d’antiseptiques à la chlorhexidine (bains de bouche ou gel) en appui au traitement.
- Réévaluation après quelques semaines pour mesurer la réduction des poches et du saignement.
Étape 3 — Thérapies avancées (au cas par cas)
Cette phase s’adresse aux cas de parodontite avancée ou réfractaire après le traitement initial.
Interventions possibles :
- Chirurgie parodontale d’accès : nettoyage en profondeur sous lambeau pour supprimer les poches persistantes.
- Chirurgie régénératrice : utilisation de membranes ou de biomatériaux (EMD, GTR) pour stimuler la régénération osseuse guidée.
- Curetage dentaire ciblé sur les zones à risque.
Thérapies complémentaires :
- Antibiothérapie parodontale :
- Utilisée de manière adjunctive, non systématique.
- Réservée aux grades C (progression rapide) ou poches réfractaires malgré SRP.
- Choisie selon le profil bactérien et les risques systémiques.
- Traitement laser parodontal :
- Peut être un adjuvant pour réduire la charge bactérienne et l’inflammation.
- Ne remplace jamais le surfaçage radiculaire, faute de preuves suffisantes.
Étape 4 — Maintenance (supportive periodontal care)
C’est la phase la plus longue… et la plus déterminante.
Elle consiste à prévenir les rechutes grâce à un suivi régulier et personnalisé.
Suivi recommandé :
- Rappels de maintenance tous les 3 à 6 mois, selon le stade, le grade et les facteurs de risque.
- Vérification du saignement au sondage, du contrôle de plaque et de la stabilité osseuse.
- Renforcement des gestes d’hygiène et du contrôle du tabac/diabète.
🧩 Parodontite & santé générale : que dit la science ?
La parodontite n’est pas seulement une maladie bucco-dentaire : elle s’inscrit dans un contexte de santé général.
Les recherches récentes confirment que l’inflammation parodontale chronique peut influencer d’autres organes, et réciproquement.
Diabète ↔ Parodontite : une relation à double sens
Le lien entre diabète et parodontite est aujourd’hui bien établi.
Ces deux maladies entretiennent une relation bi-directionnelle :
- une parodontite non traitée rend plus difficile le contrôle glycémique, en augmentant la résistance à l’insuline ;
- un diabète mal équilibré accentue la réponse inflammatoire et accélère la destruction des tissus de soutien.
👉 Les études montrent qu’un traitement parodontal efficace améliore le contrôle de la glycémie chez les patients diabétiques.
Maladies cardiovasculaires et inflammation systémique
La parodontite pourrait jouer un rôle dans la cascade inflammatoire qui favorise les maladies cardiovasculaires.
Les bactéries parodontales et les médiateurs inflammatoires circulent dans le sang, contribuant potentiellement à la formation de plaques d’athérome.
Des études récentes suggèrent que :
- les personnes souffrant de parodontite sévère présentent un risque accru d’événements cardiaques (infarctus, AVC) ;
- un traitement parodontal intensif pourrait améliorer certains marqueurs vasculaires, notamment l’épaisseur intima-média carotidienne.
Ces données restent observationnelles : la causalité directe n’est pas encore démontrée.
Cependant, la réduction de l’inflammation bucco-dentaire contribue clairement à la santé vasculaire globale.
🪥 Prévention : les gestes bucco-dentaires qui font la différence
La prévention reste le moyen le plus efficace d’éviter la progression de la maladie parodontale.
Elle repose sur des gestes simples, à appliquer chaque jour, combinés à un suivi professionnel régulier.
Hygiène quotidienne
- Brossage biquotidien pendant 2 minutes avec un dentifrice fluoré.
- Utilisation de brossettes interdentaires ou de fil dentaire pour éliminer la plaque entre les dents.
- Rinçage doux sans excès, pour ne pas perturber le microbiote oral.
Suivi professionnel
- Visites de contrôle tous les 6 à 12 mois selon les risques.
- Nettoyages professionnels réguliers (détartrage, contrôle des poches).
- Coaching personnalisé pour perfectionner les techniques d’hygiène.
Mode de vie et santé globale
- Arrêt du tabac : première mesure préventive prouvée.
- Équilibre nutritionnel : fruits, légumes, oméga-3, limitation du sucre raffiné.
- Contrôle du diabète et du stress.
- Bonne hydratation et sommeil suffisant pour soutenir le système immunitaire.
💬 FAQ
Parodontite ou gingivite : comment les différencier ?
La gingivite se limite à une inflammation superficielle des gencives, souvent marquée par un saignement au brossage. Elle reste réversible avec une bonne hygiène.
La parodontite, en revanche, touche les tissus profonds : elle provoque une perte d’attache et une destruction de l’os alvéolaire. Sans traitement, elle devient irréversible.
La parodontite se soigne-t-elle ?
Oui, dans la majorité des cas, la parodontite peut être stabilisée grâce à un traitement parodontal complet et à un suivi régulier.
Une récupération partielle des tissus est parfois possible grâce à la régénération osseuse guidée ou à certaines techniques chirurgicales.
Les antibiotiques sont-ils obligatoires ?
Non. Les antibiotiques ne sont prescrits qu’à titre exceptionnel, en complément du traitement mécanique (surfaçage radiculaire).
Ils sont réservés aux formes sévères ou aux poches réfractaires après traitement.
Le laser remplace-t-il le surfaçage ?
Non. Le laser peut être un adjuvant utile pour réduire la charge bactérienne ou stimuler la cicatrisation, mais il ne remplace pas le surfaçage radiculaire.
Quel rythme de suivi est recommandé ?
Le suivi est personnalisé selon le stade et les facteurs de risque du patient.
En général, une visite de maintenance est conseillée tous les 3 à 6 mois pour contrôler l’absence de saignement, de plaque et de poches résiduelles.
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